13 décembre 2017

Le non-respect de la procédure disciplinaire peut invalider le licenciement


La Cour de cassation censure un arrêt de cour d’appel qui approuvait le licenciement d’une directrice d’association à qui il était reproché un mauvais comportement managérial à l’origine de la souffrance du personnel. L’employeur est mis en cause pour n’avoir pas respecté le formalisme prévu par le code du travail en matière de licenciement.

Le droit disciplinaire impose le respect d’un formalisme assez strict : pour licencier, un employeur est tenu d’observer une procédure dont les étapes sont très balisées. Notons à ce sujet que les ordonnances Macron réformant le droit du travail tendent à assouplir ces règles. Dans un arrêt du 26 octobre 2017, la Cour de cassation rappelle un employeur à ses obligations.

L’employeur lance une première procédure de licenciement

Alertée sur les difficultés engendrées par le comportement managérial d’une directrice à l’origine de la souffrance du personnel, l’Association fédérale « couple et enfant-accompagnement des personnes » convoque la salariée à un entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement. A la suite de cet entretien, une réunion est programmée entre l’intéressée et le personnel du service concerné afin d’apaiser la situation (les salariés refuseront d’y participer « par peur d’éventuelles représailles » et du « caractère manipulateur » de la directrice).

L’association initie alors une nouvelle procédure de licenciement assortie d’une mise à pied conservatoire, suivie d’une convocation à un nouvel entretien préalable, lequel est reporté en raison de l’impossibilité de la salariée – en arrêt de travail pour maladie – de s’y rendre. Après sa reprise du travail, la salariée est convoquée au nouvel entretien préalable tant pour des nouveaux faits que pour les faits antérieurs, à la suite de quoi elle est licenciée pour faute grave.

Divergences judiciaires

Dans un premier temps, la cour d’appel rejette le recours de la salariée qui conteste son licenciement : après avoir estimé que les trois griefs énoncés dans la lettre de licenciement, dont celui relatif au comportement managérial de la salariée, étaient établis, elle retient en effet que les comportements fautifs de celle-ci étaient suffisamment graves pour rendre impossible son maintien dans l’entreprise.

Mais la Cour de cassation n’est pas de cet avis, elle censure l’arrêt des juges du fond en s’appuyant sur deux justifications. Elle estime :

  • d’une part, que le délai d’un mois prévu à l’article L. 1332-2 du code du travail « est une règle de fond » et que l’expiration de ce délai « interdit à l’employeur aussi bien de convoquer le salarié à un nouvel entretien préalable pour les mêmes faits que de sanctionner disciplinairement ces faits, sauf si dans l’intervalle une procédure imposée par une disposition conventionnelle a été mise en œuvre » ;
  • d’autre part, « que si, lorsque l’employeur abandonne une première procédure de licenciement pour sanctionner des faits qui ont été portés à sa connaissance postérieurement à l’entretien préalable, la convocation au nouvel entretien préalable n’a pas à intervenir dans un délai spécifique par rapport à la procédure abandonnée, le licenciement ne peut sanctionner que des faits distincts de ceux initialement envisagés ».

Délai maximal d’un mois en cas de licenciement disciplinaire

 

Le code du travail prévoit en effet que la sanction ne peut intervenir « plus d’un mois après le jour fixé pour l’entretien ». L’expiration du délai d’un mois interdit à l’employeur de convoquer le salarié à un nouvel entretien préalable pour les mêmes faits, mais aussi de le sanctionner pour ces faits.

Le licenciement intervenu à l’issue du second entretien ne pouvait donc sanctionner les faits, initialement envisagés dans le premier entretien dont la procédure a été abandonnée. En retenant parmi les manquements fautifs caractérisant la faute grave le grief lié au comportement managérial de la salariée initialement envisagé dans la première procédure de licenciement, laquelle n’avait pas donné lieu à sanction dans le délai d’un mois suivant l’entretien préalable, la cour d’appel a donc violé le formalisme prévu par le code du travail, ce qui conduit la Cour de cassation à remettre en cause cette décision en cassant l’arrêt des juges d’appel.

 

« Droit à l’erreur » au profit de l’employeur

 

L’ordonnance Macron n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 sur la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail assouplit les règles du licenciement. Ainsi, pour limiter les risques d’erreurs des employeurs et les risques de contentieux, l’ordonnance prévoit la création par décret de modèles de lettres de licenciement (formulaires Cerfa). L’employeur pourra les utiliser pour procéder à la notification du licenciement. Ces modèles rappelleront les droits et obligations du salarié et de l’employeur au moment de la rupture du contrat.

La réforme institue également un « droit à l’erreur » au profit de l’employeur: les griefs invoqués à l’encontre du salarié dans la lettre de licenciement pourront être précisés a posteriori par l’employeur après la notification du licenciement.

En outre, l’insuffisance de motivation ne rend plus à elle seule le licenciement sans cause réelle et sérieuse.