Les foyers de l’enfance s’ouvrent jusqu’aux neurosciences
Article publié par Le Média social
L’étude du cerveau peut s’avérer utile aux acteurs de la protection de l’enfance. Le Gepso les y a conviés pour ses 8e Assises à Montpellier. L’association poursuit ainsi sa démarche d’ouverture des établissements publics, après les stigmatisations du début d’année.
Même sur grand écran, le schéma semble incompréhensible. Il y est question de thalamus, d’amygdales et d’hypothalamus, entre lesquels se croisent des flèches assez obscures. Avec les explications d’Hervé Reiss, « ingénieur social », le propos devient évidemment plus limpide. Ici est représenté le circuit du stress dans notre cerveau. Et le cortex préfontal, dessiné en haut à gauche, est en fait le « régulateur des émotions », qui peut analyser chaque situation, et éteindre la peur lorsqu’elle s’avère injustifiée…
Tout le problème est que « les jeunes placés dans nos institutions sont des enfants polytraumatisés », poursuit cet éducateur spécialisé de formation. « Et cela a des conséquences particulières sur le cerveau ! » Ainsi l’orateur ne s’adresse pas à des médecins, mais bel et bien à des professionnels des établissements publics de la protection de l’enfance…
« Posture bienveillante »
Et il était bien question de travail social pour ces 8e Assises, organisées par le Groupe national des établissements publics sociaux et médico-sociaux (Gepso), les 28 et 29 novembre à Montpellier. L’intitulé même, du reste, chassait toute équivoque – « De la bonne distance à la juste proximité : aller vers, plutôt que faire venir… » Et en plénière, comme en atelier, il a bien été question de « pratique du lien », de « posture bienveillante », ou de « recueil de la parole ».
Élargir la palette
Il reste que les neurosciences « apportent des nouvelles perspectives de compréhension au champ de la protection de l’enfance », comme il est précisé dans le programme du Gepso. Et sans « s‘affranchir des champs théoriques qui ont constitué l’histoire du travail social », l’enjeu est aujourd’hui « d’élargir la palette » et « d’ouvrir les espaces de compréhension de l’Autre ». Au programme des Assises des foyers de l’enfance figurait ainsi, également, l’apport des neurosciences face aux maltraitances. Et le pédopsychiatre David Da Fonseca y aura même pu expliquer, au passage, ce qu’est la « position méta » – ce « pas de côté qui permet de ne pas être envahi par les émotions » en réalisant que notre cerveau les produit lui-même…
Faire appel à toutes les disciplines
Il est vrai que les « besoins fondamentaux de l’enfant » ont été mis au centre des priorités, après le rapport éponyme de 2017 de Marie-Paule Martin-Blachais. « Or pour connaître ses besoins, il faut faire appel à toutes les disciplines qui les étudient », explique en aparté la présidente du Gepso, Marie-Laure de Guardia. Pour mieux comprendre son cerveau, dès lors, « Il faut s’intéresser aux neurosciences, qui depuis plus de dix ans l’étudient, en croisant la psychiatrie, la neurologie et la psychologie ». Du reste, « les nouveaux professionnels sont très ouverts à cette approche », remarque la présidente.
« Les médias peuvent être nos alliés ! »
Voilà qui prolonge donc la démarche d’ouverture prônée par le Gepso au terme d’une année particulière. Car en janvier dernier, les foyers de l’enfance ont été singulièrement mis en cause par le documentaire de France 3 sur les enfants placés, décrits comme des « sacrifiés de la République ». Passée la sidération, le Gepso a constitué un groupe de travail pour la communication en protection de l’enfance. « Et notre réponse est finalement d’appeler nos établissements à l’ouverture », explique Marie-Laure de Guardia. De fait, « la violence est inhérente à notre mission » : plutôt que de la cacher, l’essentiel est d’y répondre, et notamment grâce aux neurosciences. Mais pour « chasser les idées reçues, les établissements doivent devenir politiques, parler de ce qu’ils font, et s’exposer »… « Les médias peuvent être nos alliés ! »
Les établissements doivent s’ouvrir
Le Gepso a d’ailleurs profité de l’anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE), le 20 novembre, pour communiquer publiquement sur « la nécessité d’ouverture des établissements ». Le groupe national compte même proposer à ses adhérents, dès 2020, « des actions de communication en direction des partenaires » et de « ceux qui les côtoient ».
« Cuvée spéciale »
Au fond cette « cuvée spéciale » qu’aura été 2019, selon Marie-Laure de Guardia, aura même « fait émerger un regard différent, plus bienveillant, sur la protection de l’enfance ». Pour preuve, la présidente cite la nomination d’un secrétaire d’État ad hoc en janvier, mais aussi un plan contre la pauvreté attentif à l’enfance, ou encore un dernier rapport du Défenseur des droits s’ouvrant à la violence des institutions publiques… « Désormais on peut s’exposer et travailler en sérénité ». Et même se pencher sur les neurosciences.